Poème de Claude Dussert (1947-) – Partenaire d’AFROpoésie – FRANCE

Le temps, petit à petit, laissait son empreinte
La boue statufiait son visage
Ses yeux vert émeraude, absents, tétanisés
Semblaient inventorier l’intérieur des corps.
Les battements de son cœur, transpercé de terreur
Imprégnaient son âme, dissolvaient la moiteur
De l’île aux serpents, Eden des passereaux.
La grêle était de feu, de cartouches infamantes
Les jours se confondaient avec la nuit noire
Il était seul au monde ;
L’espoir s’était enfui tout comme les oiseaux.
Voir le matin rosir dans ce capharnaüm
Etait à peine un rêve, un semblant d’illusion.
Certains de nous pleuraient des larmes de courage ;
Il nous fallait tenir ce bastion miniature
Confetti posé là, ouvert à tous les vents
Espace stratégique.
Des corps pétrifiés dans la glaise crachaient
Des mots de terre battue.
Un soldat près de moi écrivait une lettre
Avec l’encre de sang d’un ami trépassé.
Le papier ? Une feuille volée dans un carnet tombé
D’un treillis déchiré.
Quant au petit matin d’un jour désincarné
La relève espérée pris l’île en héritage
Nos oreilles sifflaient
Personne n’y croyait.
Les explosions en écho résonnaient
Aux cris des rescapés.
Pour eux alors la guerre ne
Faisait que commencer.
14 Septembre 2023