« L’île des Serpents » de Claude Dussert

Poème de Claude Dussert (1947-) – Partenaire d’AFROpoésie – FRANCE

L’île des Serpents en 1896

Le temps, petit à petit, laissait son empreinte

La boue statufiait son visage

Ses yeux vert émeraude, absents, tétanisés

Semblaient inventorier l’intérieur des corps.

Les battements de son cœur, transpercé de terreur

Imprégnaient son âme, dissolvaient la moiteur

De  l’île aux serpents, Eden des passereaux.

La grêle était de feu, de cartouches infamantes

Les jours se confondaient avec la nuit noire

Il était seul au monde ;

L’espoir s’était enfui tout comme les oiseaux.

Voir le matin  rosir dans ce capharnaüm

Etait à peine un rêve, un semblant d’illusion.

Certains de nous pleuraient des larmes de courage ;

Il nous fallait tenir ce bastion miniature

Confetti posé là, ouvert à tous les vents

Espace stratégique.

Des  corps pétrifiés dans la glaise crachaient

Des mots de terre battue.

Un soldat près de moi écrivait une lettre

Avec l’encre de sang d’un ami trépassé.

Le papier ? Une feuille volée dans un carnet tombé

D’un treillis déchiré.

Quant au petit matin d’un jour désincarné

La relève espérée pris l’île en héritage

Nos oreilles sifflaient

Personne n’y croyait.

Les explosions en écho résonnaient

Aux cris des rescapés.

Pour eux alors la guerre ne

Faisait que commencer.

14 Septembre 2023

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