Poème de René Philoctète (1932-1995) – HAÏTI

Jamais je ne me suis demandé pourquoi je continue
de vivre ici
comme je ne me suis jamais demandé pourquoi je
respire
pourquoi je dors
pourquoi je parle comme je parle
Au fait
pourquoi suis-je encore ici?
Peut-être pour ce pic appelé Morne-la-Selle,
peut-être pour le chemin dit des Quatres-Chemins,
ou parce qu’il manque d’écoles,
pour ce fleuve nommé Artibonite,
la dame-oiselle appelée Sara,
ou pour le manque d’hopitaux,
peut-être pour cette rue appelée rue des Miracles,
une fleur qui fleurit à dix heures,
peut-être pour toutes ces âmes qui vivent dans le noir.
Parce que le FMI nous abuse-atrophie-démantèle-
vilipende,
parce qu’un policier a tué un étudiant place Capois-la-Mort,
parce que mon pays s’est fait yoyo, toupie folle,
coeur d’igname sans couteau.
Mais je reste
Pour cet arbre que j’aime à l’entrée de la Grande Anse,
Pour mon soleil brûlant qui rit des faux soleils,
Pour une femme nommée Emeline Michel,
Pour ces tambours qui ne cessent de battre,
Parce qu’il y a un héros appelé Dessalines,
Parce que inébranlable
il y a ici un peuple qui veut s’ouvrir à la vie.
Poème écrit en créole haïtien (Conjonction, n 195-195, »Cent poèmes créoles », Port-au-Prince, 1992), traduction de Lyonel Trouillot.
Emouvant ! Très émouvant !
Merci.
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Effectivement, une belle déclaration d’amour à Haïti.
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