Lamba (extraits)

Poème de Jacques Rabemananjara (1913-2005) – MADAGASCAR

Illustration: vue satellitaire du fleuve Betsiboka (22 septembre 2003)

800px-Betsiboka_River_September_22,_2003.jpg

Ta beauté,
Charme impair,

C’est avant tout le pollen retrouvé dans un coin du

verger, les pollens du bel arbre autonome qu’un soir a dépouillé de sa couronne de verdure un brusque vent de neige né du
Septentrion.
La sève a trop longtemps fermenté sous l’écorce, le levain pour le pain pascal de la
Rénovation :
Or la glaise même est féconde où la foudre est

tombée…

Toi-même et le
Totem
Toi-même et la
Lointaine
Toi-même et l’Innommée

et la
Crépue et la
Frisée et l’Amande et le
Palissandre

Toi-même et la puissance incoercible du sang noir

le tromba le vaudou

l’envoûtement l’amok

l’ébène le béryl le baume le bambou la bosse du zébu beuglant sous le baobab

l’abîme où le boa bâille la gueule en feu

le
Betsiboka bouillonnant de baves rouges de sauriens

et la boucle du
Bémarah flambant de boules de soleil tout le déchaînement du tabou foudroyant et des forces cycliques du limon !

L’autre incantation affleure de dessous ta robe, tes

aisselles, tes ongles, tes paupières lève de toute part

comme le blé précoce étoile de rosée, brouille l’air et la face immobile de l’onde et l’herbe de

la plaine et le roc des sommets comme une brume verte d’incendie au-dessus de l’étang.

Voici, ô noir héraut de l’infini,

l’accouchement sublime où du sein de sa fille est née la

Vierge-Mère.
Voici, voici rompant l’opacité des eaux, rompant du blanc chaos l’accablement d’apocalypse et

de granit

resurgir, ô prodige, avec ton port de tête et l’anse de

tes hanches, belle suprêmement de ta beauté impaire, la fabuleuse
Lémurie !

La
Lémurie où gît tout l’os de notre énigme !
La
Lémurie des dieux rieurs et des talismans forts de fuchsines fulminatoires !

Ah ! butin, butin de victoire !

La découverte du vengeur armé d’un vert silex, d’onyx

et de simplicité !
Précellence, ô
Bozy, de la sommaire sarbacane !
Ohé pour le gibier d’un noir immaculé !
Ohé pour ton apothéose érigée dans la nue en cornes

de bubale !

Je te reconnais entre cent, entre deux

Je te reconnais entre mille à ton clin de cil

prémonitoire !
Quel temps fait-il là-bas en amont de l’Ivoundre, où j’ai

planté des flamboyants !

 

 

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