Le 18 mars 1995.

Chers Amis,
Il y a 18 mois, lors de la pose de la première pierre de ce magnifique ensemble, je vous disais combien ma femme et moi même ressentions, avec fierté, l’honneur qui m’était fait en dénommant ce lieu : ESPACE LEOPOLD SEDAR SENGHOR.
En ce 18 mars 1995, c’est un Versonnais qui partage, avec vous, cet événement qui fera date dans la vie de notre cité.
En effet, dans ma retraite normande, le poète sérère, qui chantait jadis son sine natal aux verts bolongs, vit pleinement sa « normandité » aux verts pâturages.
Je serai bref. Je voudrais non pas faire un discours, mais simplement délivrer deux messages à l’attention des jeunes qui vont fréquenter cet espace.
Le premier est celui de la culture que votre municipalité a voulu matérialiser ici même. La culture, c’est une certaine façon, propre à chaque peuple, de sentir et de penser, de s’exprimer et d’agir. C’est un langage commun, qui rapproche et unit les hommes, une prise de conscience et une expression de la complexité du réel : elle est un style, une manière d’éclaircir les choses et les évènements.
A travers ces définitions, vous percevrez, je n’en doute pas, toute l’importance de la culture, tout son poids, pour véhiculer les idées, révéler les talents, unir les hommes les uns aux autres.
La culture est, en un mot, l’âme même de la société. Et vous comprendrez peut-être mieux si je vous explique qu’elle s’étend d’un auteur classique qui m’est familier, Hérodote, jusqu’à un artiste que les jeunes connaîtront mieux : MC Solaar.
Pour ma part, j’ai essayé d’être le porte-parole de la culture négro-africaine, que j’ai appelé la Négritude, et de son expression dans la poésie et dans les arts.
Je me veux également le chantre de la langue et de la culture française. Je crois, pour l’avenir, à la francophonie, plus exactement à la francité, intégrée dans un grand ensemble, et par-delà, dans une civilisation de l’universel.
La civilisation de l’universel, voilà le second message que je vous livre.
Aujourd’hui, les hommes se communiquent leurs idées, leurs sentiments, leurs techniques, d’un bout à l’autre du monde, par des moyens qui ignorent les distances.
Pour se développer, les civilisations doivent se respecter, s’enrichir de leurs différences pour converger vers l’universel que Teilhard de Chardin annonçait à l’aube du troisième millénaire.
Cependant, nous devons reconnaître qu’actuellement, pour une grande partie de l’humanité, l’échelle des valeurs a perdu toute signification. Il vous appartient, à vous les jeunes, d’élaborer cette civilisation de l’universel, qui sera faite des valeurs complémentaires de tous les continents et de tous les peuples. Gardez à l’esprit qu’il n’y a pas de civilisation sans culture car l’effort culturel est lui-même la principale valeur de la civilisation.
Je souhaite que cet espace Léopold Sédar Senghor (puisque c’est ainsi qu’il faut l’appeler à présent) soit un lieu de rencontres, d’échanges, qui vous permette de trouver le bonheur culturel et de vous ouvrir aux autres civilisations.
Je voudrais, en terminant, vous remercier sincèrement, Monsieur le Maire, ainsi que tout votre conseil municipal du plaisir que vous m’avez apporté aujourd’hui.