Poème de Claude Dussert (1947-) – Partenaire d’AFROpoésie – FRANCE

Abattons ces frontières rouges à nos fronts !
Barbelés et cisailles arment nos bras blessés.
Après avoir tiré sur les tyrans
Nous nous sommes retirés en tirant
Tirs à vue, tirs en rafales
Rappelez-vous ?
Dans ce no man’s land
Pas de quoi faire la bombe, je le jure
Rien alentour ne rassure.
Certains d’entre nous ont sauté sur des mines
Il suffit de bien regarder leurs mines.
Défigurés.
Nos aïeux ou nos pères ont fait la der des ders
Oui, ils l’ont tracé le chemin des dames.
En souvenir ils ont laissé
Un cœur, un poumon, une jambe
Un bras, un peu de haine, beaucoup d’amour
Leurs âmes aussi, mais pas de raton laveur.
Vingt ans après !
Le Généralissime dansait flamenco
Adolphe brûlait ses tableaux
Staline, petit père s’alliait avec Hitler
Mussolini en a ri et bradé l’Italie.
De haine ou de peur Hirohito en a jauni.
Après Hiroshima et Nagasaki,
Le monde s’est réconcilié, enfin, en partie.
Mais moi je me tire ailleurs
Je suis Sénégalais.