Poème de Shams Nadir (1940-) – TUNISIE

Quand sonne l’heure au secret de la conque
De nouveau, verdit le Sahara
Comme aux temps de la gloire caspienne.
Et convergent les caravanes.
De Sijilmassa, grand emporium des sables
De Tombouctou, jardin éclos autour de l’Arbre
De Tassili, ivre de ses fresques.
Alors Carthage parle à Joal…
Et la rumeur des vagues à Popenguine
Retrouve son écho au rivage des Syrtes.
Longtemps nos paroles croisées ont tatoué la mer
Comme, en leur envol souverain,
Les colombes de nos pensées calligraphiaient le ciel
Nos chants emmêlés ont fait lever l’Harmattan
Et, dans la plume des moissons,
Dériver, cavale de pollen germiné,
Les légions pacifiques du Poème
Feu et neige sur la coiffe du Kilimandjaro
Poisson d’or sur les eaux mères du Congo
Antilope cabrée aux flancs des dunes blondes
Étoile évanescente parlant au nom du jasmin
Le Poème.
Racine du baobab, chevelure du palmier
Question du Sphinx sculptée à l’abrupt des falaises
Respiration des marées, portulan des nuages
Le Poème, en ses métamorphoses.
Il dit, le poème :
Qu’un seul arbre peut être ciel
Une seule aurore, naissance
Et que l’amour est la raison du monde.
Il dit, le poème :
Continue ton chant, Coryphée
Pour donner la mesure au chœur qui t’accompagne
Car si tu cesses d’apprivoiser la mer
Qui, jamais, pourra nous conjurer
Contre la montée des eaux ?
Qui, jamais, nous offrira son Arche
Contre le Déluge ?
Poème dédié à L.S. Senghor, emprunté au site https://unesdoc.unesco.org/